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Vers la validation d’un plan de prévention des risques urbains pour la ville du Cap-Haïtien.

Publié le par Marco Geo

Haïti, par sa position, est exposée aux aléas cycloniques, sismiques très élevés. Les secousses sismiques et les perturbations météorologiques génèrent, entre autres, des inondations, des glissements de terrain, des tsunamis et des pertes énormes en vies humaines, en biens, en infrastructures. Les violents séismes de 2010 et le cyclone Matthew ont montré combien le pays est vulnérable aux risques cycloniques et sismiques. Dans une approche Beckienne, Haïti est ‹‹ la société du risque ›› et/ou des risques. Selon les professeures Barrette et Daleau (2012) un risque naturel, comme une inondation, peut facilement engendrer un risque sanitaire qui, à son tour, peut conduire à un risque politique et social. L’urbanisation non contrôlée caractérisée par le déboisement, l’érosion, l’occupation des zones fragiles sècheresse, l’irrespect des normes urbanistiques et de construction, l’inadéquation des services et des infrastructures, l’absence d’une conscience citoyenne, l’inexistence et l’inapplication des rares plans d’urbanisme, d’aménagement, de prévention des risques ou de gestion des risques et des catastrophes à l’échelle communale en sont les principales causes. Les conditions socio-économiques sont encore un facteur très important. Dans cet ordre d’idée, tout effort qui vise à faire une gestion rationnelle des risques et des catastrophes doit nécessairement passer par une entrée double. D’une part, la réduction de la vulnérabilité sociale des populations et d’autre part la mise en oeuvre d’une politique de prévention de risques et de gestions des risques. Puisque les catastrophes – dites naturelles pour innocenter l’homme — ne sont pas inéluctables. Comme a souvent dit Claude Préptit ‹‹ se pare pou n pare ››. Et, on doit aussi tirer des leçons. On l’a vu, elles peuvent créer des opportunités qu’il faut savoir mettre à profit et pour cela le développement même de la ville doit avoir reconnu, accepté et intégré la possibilité de perturbations, éventuellement inconnues (Laganier, 2012). C’est dans cette démarche que l’État haïtien, peut-être, s’inscrit après le passage des évènements catastrophiques qui retardent encore plus son développement tant souhaité.

Vers un plan de prévention des risques urbains pour la municipalité du Cap-Haïtien

Avec l’aide du Japon et du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), pour le compte des ministères de la Planification et de la Coopération externe (MPCE), et de l’Intérieur et des Collectivités territoriales (MICT), la municipalité du Cap- Haïtien va être dotée d’un plan de prévention des risques urbains (PPRU). Ce dernier est une description et une transcription règlementaire des risques en milieu urbain. Il est constitué d’un rapport de présentation, des cartes des aléas, des enjeux, d’un zonage réglementaire, des règlements. Ces derniers comportent des prescriptions et des recommandations sur l’existant et sur les futurs projets des mitigations.

Pour valider ce plan, un atelier de validation des plans de prévention de risques urbains réalisés dans le cadre du projet de soutien à la résilience aux désastres a été organisé le mardi 21 novembre 2017 en présence des élus locaux du département de la Grand’Anse, de la délégation du nord, d’un représentant du ministère de la Planification et de la Coopération externe (MPCE), des responsables des universités privée (Roi Henry Christophe) et d’État (Campus Henry Christophe à limonade), de la direction départementale du ministère de l`Environnement, de la responsable des brigadiers à l’échelle du département du Nord.

Le plan de prévention de risque est, sans conteste, un grand pas positif pour la ville du Cap- Haïtien qui n’est non seulement une ville multirisque, mais aussi risquogène. Cet outil indispensable à la gestion efficace des risques et des catastrophes constitue une aide aux autorités étatiques à différentes échelles.

Pour être efficace, une politique de prévention des risques doit s’attacher à protéger les éléments qui sont, à la fois, les plus importants et les plus vulnérables en commençant par l’identification et la hiérarchisation des enjeux majeurs du fonctionnement et du développement d’un ou des territoires et l’analyse de leur vulnérabilité (D’Ercole, 2012). Élément qui se place depuis les années 2000 au cœur de la définition des risques.

Les lois sans leur respect

Haïti est, par excellence, un État de lois. Les lois, les règlements, bien que certains soient en situation de désuétude, sont pléthoriques. Mais le grand défi reste leur application et/ ou leur respect. Depuis 1963, Haïti est dotée des plus belles et bonnes lois du monde. Il suffit, d’abord, de lire les lois et les règlements d’urbanisme traitant des questions liées au bâtiment, au lotissement, aux voies publiques, aux servitudes, au domaine public à la protection de l’environnement, à l’urbanisme, à la mitigation des risques et urbanisme, à la déclaration d’utilité publique, aux plans et aux schémas d’aménagement ; pour constater que si ces lois étaient appliquées. L’aspect physique de nos villes, notamment celles de Port-au-Prince et du Cap- Haïtien, ne serait pas caractérisé par des bidonvilles. Et, les problèmes des villes ne seraient pas si complexes. En Haïti, ce ne sont pas des lois, des règlements qui manquent à nos villes et notamment au Cap- Haïtien. C`est leur inapplication, leur irrespect caractérisé par le laxisme, l’incapacité de gestion et de planification, l’irresponsabilité, la légitimité populaire et la complicité qui font défaut. À titre d’exemple, le décret du 12 octobre 2015 en son article 126 fait du littoral le domaine public de l’État et interdit toute occupation, toute exploitation, toute construction pouvant entraver le libre accès au domaine public maritime et la libre circulation sur les plages. Mais presque toutes les zones littorales d’Haïti où il y a une ville traduisent la négation de cet article. Au Cap- Haïtien, les habitants, pour faire taire les chauffeurs du service de la voirie de la mairie, leur donnent 50 et 100 gourdes respectivement pour des petits et grands camions de fatras pour ‹‹ faire terre ›› (fè tè), c’est-à-dire s’avancer vers la mer. C’est dans ce contexte que nous nous demandons si la municipalité capoise retrouvera la capacité de faire respecter les règlements du plan fraichement élaboré?

 

 

Bibliographie

Manigat M. (sous la dir.), 2008, Cap- Haïtien excursions dans le temps, voix capoise de la diaspora, Educa Vision, Floride.

Péan M., 1978, L’illusion héroïque : 25 ans de vie capoise, 1890-1915, Imprimerie Henri Deschamps, Port-au- Prince.

Péan M., 1993, La ville éclatée : décembre 1902 – juillet 1915, Imprimerie Henri Deschamps, Port-au-Prince.

PIERRE, L.M., 2016, Cap- Haïtien: développement et crise urbaine, poster scientifique, CHC-UEH-L.

Pierre L.M., 2017, Cap-Haïtien entre développement et dysfonctionnement urbains, Le national, Port-au-Prince.

 

Pierre Louis Marc

 

PHD.C, Historien et Géographe

louismix49@yahoo.fr

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